Procès des attentats de Bruxelles: l’Etat Belge condamné pour les fouilles à nu pratiquées sur les accusés

13/03/2023

Publié le 13/03/2023 à 11:20 Par le Soir

Les fouilles à nu pratiquées sur les accusés du procès des attentats de Bruxelles sont jugées illégales.

Les accusés remportent une bataille judiciaire contre l'Etat belge. La cour d'appel de Bruxelles a ordonné lundi à la police de cesser les fouilles à nu intégrales avec génuflexions pratiquées chaque jour sur les accusés détenus du procès des attentats de 2016 à Bruxelles, selon une copie d'arrêt transmise au Soir.

Cette question perturbe depuis décembre la participation des accusés au procès. Salah Abdeslam, qui compte parmi les six plaignants, a refusé de comparaître en attendant que la pratique cesse. L'Etat belge, qui l'a justifiée par des raisons de sécurité, avait fait appel d'une première décision défavorable rendue fin décembre.

La cour d'appel déclare que les génuflexions qui sont imposées aux inculpés pendant les fouilles corporelles avant chaque transfert vers le Justitia ne sont pas prévues par la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police. Elle juge que cette pratique est contraire à l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme protégeant le droit au respect de la vie privée.

Sur les lunettes occultantes, elles aussi l'objet de critiques des détenus, la cour estime qu'elles ne sont autorisées que pour la durée du déplacement entre le palais de justice et la prison, dans les véhicules de police transportant les accusés. Ainsi, la cour d'appel de Bruxelles donne largement droit aux demandes de Mohamed Abrini, Salah Abdeslam et consorts. Tous les accusés détenus à ce procès, à l'exception du Suédois Osama Krayem, avaient attaqué ces mesures de sécurité devant les tribunaux.

Jurisprudence ?

L'Etat belge, et donc la police fédérale, doit cesser immédiatement d'imposer des génuflexions aux accusés lors des fouilles au corps sous peine d'une astreinte de 1.000 euros par personne et par jour (plafonné à 25.000 euros). Plus que l'amende, c'est le potentiel jurisprudentiel de l'arrêt qui va interroger l'Etat et ses forces de police. Ces procédures de sécurité étaient jusqu'alors pratiquées sur l'ensemble des détenus analysés par l'Ocam au niveau 3 (sur une échelle de 4) de la menace par l'Ocam.

Un de ces policiers spécialisés chargés d'encadrer les accusés au procès terroriste, interviewé par Le Soir il y a quelques semaines, regrettait cette situation : « Abdeslam, il ne sortira jamais de prison. Il a 24 heures de ses journées où il n'a rien d'autre à penser qu'à déstabiliser l'Etat ou à s'échapper. Et à mon avis, pour le premier objectif, il a déjà réussi. Ils ont réussi avec leurs avocats à découpler le niveau de la menace des procédures de sécurité », nous disait ce policier d'élite. « Et maintenant, d'autres s'engouffrent dans la brèche, comme le trafiquant Flor Bressers qui a tenté de contester les fouilles à nu lui aussi. Tous les « niveaux 3 » sont en train de protester, c'est la preuve que des accusés au procès du 22-Mars ont réussi à déstabiliser l'Etat. »

L'arrêt de la cour d'appel ne sera débattu à l'audience du procès des attentats qu'à la reprise, après la pause de midi, le temps que cet arrêt soit transmis à la présidente. Pendant ce temps, les victimes ou proches des victimes des explosions à Zaventem se succèdent pour déposer leurs témoignages.

Réaction

« On a une décision claire : il faut que ces fouilles cessent », déclare Me Guillaume Lys, avocat de l'association de victimes V-Europe. « Nous les victimes n'étions pas partie à cette procédure, la seule chose que l'on réclame c'est que cette histoire s'arrête. Que cela arrête de parasiter les débats de la cour d'assises. Maintenant, il suffit d'appliquer une décision rendue par une cour d'appel. »