L’abandon d’un chat à la sauvette à l’entrée du refuge Veeweyde : "Un animal n’est pas un dépôt clandestin"

31/03/2023

Par Karim Fadoul

Un abandon à la porte du refuge ! Un homme a abandonné son chat, dans sa cage, à l'entrée des locaux de la Société royale protectrice des animaux (SRPA) à Anderlecht, avant de prendre la fuite. Un comportement qui a surpris les équipes de Veeweyde. L'acte a été filmé par les caméras de vidéo surveillance, installées récemment. Dans les captures d'écran que nous avons pu obtenir, on peut distinguer l'apparente insensibilité du maître au moment de son acte.

Nous avons tenté de rattraper le maître…

Nous sommes mardi 28 mars, au matin. Le refuge est ouvert. Et pourtant, le propriétaire du petit félin a préféré le déposer à l'entrée, à la sauvette…

"C'est entre les deux portes d'entrée que cette personne a déposé la cage de transport. Puis elle s'est dirigée vers le parking et la rue pour fuir", raconte Ludivine Nolf, la porte-parole du refuge Veeweyde. "Elle était garée plus loin dans la rue. C'était très certainement intentionnel, pour éviter que l'on puisse reconnaître sa plaque d'immatriculation. Lorsque nos équipes du refuge ont vu les images sur les écrans de surveillance, l'un de nos collaborateurs a tenté de rattraper la personne. Mais c'était trop tard… Cet acte est surprenant. C'est un peu comme si cet animal était un dépôt clandestin"

Le refuge a recueilli, évidemment, ce chat. Il est âgé d'un an, c'est un tigré de race européenne. Il a été vacciné, pucé, placé en observation… Son arrivée au refuge est récente. Pas étonnant de le voir prostré dans son panier et tremblant… "Il est stressé, parce qu'arriver dans un refuge, ce sont de nouvelles odeurs, des bruits, une familiarisation à entreprendre avec les animaliers. Et puis, tout le monde ici ignore ce que ce chat a vécu parce que son propriétaire n'a pas voulu se présenter à nos services, pour nous raconter l'histoire du chat."

Une démarche qui aurait peut-être permis aux équipes de comprendre une éventuelle situation de détresse du maître d'ordre financier ou de santé et donc d'autoriser le recueil du chat à titre exceptionnel.

Ce chat, âgé d’un an, a été abandonné à la porte du refuge. © VEEWEYDE
Ce chat, âgé d’un an, a été abandonné à la porte du refuge. © VEEWEYDE

Cet abandon interpelle car il n'est pas le premier du genre… Des personnes ont déjà abandonné des lapins sur le parking, des chiens attachés à un poteau sur le trottoir d'en face… Un peu comme un vieil objet dont on veut se débarrasser, "un peu comme un dépôt clandestin", se désole Ludivine Nolf. Le contexte actuel, avec la crise sanitaire suivie d'une crise énergétique peut expliquer cette hausse des abandons. "Il n'y a plus de saison pour les abandons d'animaux comme nous avions auparavant les abandons en été", indique Gaëtan Van Goidsenhoven, le président de la Société royale protectrice des animaux.

Preuve : la même journée que l'abandon du chat à la sauvette, la visite d'une dame opérant un chantage sur les personnes à l'accueil. "Elle est venue déposer son chat, nous obligeant presque à le prendre au refuge. Elle expliquait que c'était ça ou alors qu'elle allait l'abandonner plus loin dans la rue", raconte Ludivine Nolf.

Un chantier qui réduit la capacité d'accueil

La conséquence pour le refuge : une saturation permanente avec actuellement 25 chats, 46 chiens (dont la moitié d'American staffordshire) et 10 nouveaux animaux de compagnie à savoir des lapins et des cochons d'Inde. Beaucoup d'autant qu'un chantier (sur fonds propres) d'agrandissement et de mise aux normes du refuge vient de débuter… Clôture des travaux prévue fin 2024, début 2025.

L’homme avec sa cage dans les bras arrivant devant le refuge. © VEEWEYDE
L’homme avec sa cage dans les bras arrivant devant le refuge. © VEEWEYDE

En attendant, un quart de la capacité d'accueil doit être sacrifié. "La capacité d'accueil dépend aussi des adoptions. Même si c'est en ce moment très compliqué d'augmenter les places disponibles", ajoute Ludivine Nolf.

Une plainte envisagée

En tout cas, Veeweyde envisage sérieusement d'introduire une plainte contre le propriétaire du chat abandonné. "Faut-il encore le trouver. On sait malheureusement que les dossiers en termes de bien-être animal ne sont pas très bien suivis au niveau de la justice", regrette le président de la SRPA. "Là aussi, il faudrait en sorte que la maltraitance animale, au-delà des règles votées dans les parlements, fasse l'objet d'un suivi administratif et judiciaire renforcé."

Pour rappel, Bruxelles ne dispose pas encore d'un code du bien-être animal comme les autres Régions du pays… Mais l'article 35 du Code pénal belge puni déjà d'une peine d'emprisonnement d'un mois à trois mois et d'une amende de 52 euros à 2000 euros toute personne qui "abandonne son animal avec l'intention de s'en défaire".

Veeweyde insiste : un animal n'est pas un jouet… "Ce qui s'est passé ce mardi m'inspire un sentiment assez amer", admet Gaëtan Van Goidsenhoven. "Cela montre malheureusement que beaucoup de personnes considèrent les animaux comme des biens de consommation qu'on abandonne devant un refuge comme on abandonne une vieille télévision devant une bulle à verres. Il y a des progrès à faire beaucoup d'esprit. L'animal, même si on lui reconnaît un certain nombre de droits – on pense même faire entrer le bien-être animal dans la constitution – est un être sensible. Prendre un animal, c'est une responsabilité avant d'être une source de satisfaction personnelle."